Des projets eux-mêmes issus d’une sélection réalisée parmi 44 dossiers par le comité organisateur et terminée en décembre dernier.
Les concurrents ont donc 18 mois pour réaliser leur prototype, ce qui ne sera pas de trop... étant donné l’ambition et les dimensions des réalisations. Ainsi, le lauréat de l’édition 2012 en Espagne, le prototype Canopéa de l’équipe Rhône-Alpes emmenée par l’ENSAG (École nationale supérieure d’architecture de Grenoble) et l’Ines (Institut national de l’énergie solaire) a mobilisé neuf semi-remorques pour rejoindre le lieu du concours ! « C’est une compétition d’architecture solaire qui dure quinze jours et voit s’affronter les vingt meilleures équipes de la planète, évaluées sur 10 grands critères, d’où le terme décathlon. Son retentissement actuel justifie les importants moyens mis en oeuvre » explique Vincent Jacques le Seigneur, secrétaire général de l’Ines, l’organisateur de la compétition de 2014 sous l’égide du Ministère du Logement.
Le Solar Decathlon représente, selon ce spécialiste, un trésor de bienfaits pour l’industrie. Lorsque les projets sont sélectionnés, les étudiants doivent en effet aller chercher des partenaires industriels ; 70 entreprises étaient ainsi associées autour du prototype Canopea, l’année dernière. Ces entreprises sont alors incitées à innover, oser, prendre des risques. Un exemple ? La société alsacienne Bubendorff, premier fabricant européen de volets électriques. Impliquée dans le projet français Armadillo Box (4e prix lors de l’édition 2010), invente pour les besoins de la cause un volet roulant autonome à lames orientables, équipé d’une motorisation alimentée par les seuls capteurs solaires. Un appareil aujourd’hui en bonne place dans son catalogue.
Cette compétition est aussi un vecteur de sensibilisation aux enjeux de la construction « solaire », dans de nombreux pays. Ainsi, la Roumanie, présente pour la première fois à Madrid en 2012 et via un seul projet, est revenue pour la compétition 2014 avec pas moins de cinq dossiers, présentés par cinq écoles d’architecture différentes.
La dimension internationale prise par le Solar Decathlon est d’ailleurs riche d’enseignements sur les différentes philosophies en matière d’architecture ; 100 % américaine et biennale au départ, la compétition a investi le continent européen depuis 2010, où elle se déroule en année impaire - une édition chinoise vient en plus se rajouter cette année... Or, selon Vincent Jacques le Seigneur, il faut prêter attention à l’évolution des règlements respectifs des compétitions. Aux Etats-Unis, l’accent est mis sur la production d’énergie, qui doit être maximale et qui influe beaucoup sur le choix du lauréat. En Europe, c’est exactement l’inverse : la puissance maximale autorisée a été divisée par trois dans le nouveau règlement. . Pourquoi ? « L’approche américaine est centrée sur la maison individuelle avec jardin. Pour notre part, nous considérons que l’enjeu réside plus dans les projets collectifs et urbains. Les équipes travaillent donc beaucoup plus sur la maîtrise de la demande en énergie que sur la production d’électricité solaire » explique Vincent Jacques le Seigneur.
Et pour l’édition européenne de 2014, une dimension supplémentaire a été suggérée aux équipes candidates : prendre en compte les questions de transport dans leur projet architectural, pour là aussi mieux appréhender la réalité de la consommation énergétique.
Jean-Philippe Pié
