Qualité de l’air intérieur : la grande perdante de la nouvelle RT

Source : Le Moniteur.fr 19/03/2012

Alors que les bâtiments sont de plus en plus étanches pour consommer moins d’énergie, le renouvellement de l’air nécessaire à sa qualité sanitaire n’est que trop rarement assuré. Plus que technique, le problème apparaît culturel.

Contexte

Depuis le premier choc pétrolier de 1973, les pouvoirs publics accumulent les réglementations thermiques. Mais côté qualité de l’air intérieur depuis l’arrêté du 24 mars 1982 relatif à l’aération des logements… Rien. L’habitat rénové ne fait l’objet d’aucune obligation réglementaire.
Du côté du tertiaire, c’est l’incohérence : le règlement sanitaire départemental préconise 15 m3/h/personne dans une classe, tandis que le Code du travail réclame 25 m3/h/personne et aucun syndicat ne s’est insurgé face à cette différence. Ces débits d’air sont insuffisants, les textes nécessiteraient d’être révisés. D’autant que cette quête d’une meilleure QAI va désormais être confrontée à une exigence renforcée pour la construction neuve : l’étanchéité à l’air, indissociable corollaire de la RT 2012. Alors en neuf comme en réhabilitation, le traitement de l’air neuf est plus que jamais un élément prépondérant au confort des usagers et à la maîtrise de la consommation énergétique.

La ventilation est primordiale

Avant l’ère des réglementations thermiques, les bâtiments étaient perméables à l’air extérieur. Les nombreuses infiltrations contribuaient au renouvellement d’air. Depuis, ces derniers étant plus étanches, les infiltrations d’air sont supprimées, et l’apport de renouvellement d’air est devenu inférieur. D’où une autre incohérence générée par l’obsolescence de l’arrêté de 1982 car les objectifs sont de maintenir le même niveau de qualité de l’air intérieur et de moduler les débits en fonction des besoins tout en récupérant l’énergie de l’air extrait.
Le critère énergétique relatif au traitement d’air neuf va-t-il rester si primordial quand nombre d’études sur la salubrité des locaux alertent sur les divers impacts sanitaires des moisissures et des composés organiques volatils (COV) issus du mobilier ou des matériaux de construction ? Apparemment, cette nocivité n’est pas prise en considération.

Une performance énergétique privilégiée

Selon une étude menée par l’Ademe et l’association Air. H, 70 % des logements collectifs et 60 % des logements individuels n’ont pas de ventilation efficace. Et selon l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI), 60 % des installations de VMC ne sont pas conformes à l’arrêté de 1982. 80 % des logements rénovés sont équipés d’une VMC simple flux autoréglable. Si elle permet d’évacuer un débit d’air constant pour assurer le renouvellement réglementaire de 0,6 volume/heure, elle reste peu satisfaisante sur la filtration de l’air entrant. Mais demeure tout de même meilleure de ce point de vue que la ventilation hygroréglable de type B, qui est devenue le standard de la construction neuve depuis la RT 2000. Cette ventilation n’est ajustée que sur un seul paramètre de la qualité de l’air intérieur : l’hygrométrie. Elle tolère de faibles débits qui peuvent être insuffisants face à des concentrations élevées de COV dans une ambiance sèche. En termes de consommation, cet équipement est forcément pénalisé puisqu’il comporte deux ventilateurs, en plus d’être coûteux.

Traitement efficace de la QAI ?

Face à l’absence de prise en considération de ce problème de santé publique, le discours d’Olivier Sidler, du cabinet Enertech, spécialiste en ingénierie énergétique, cible la présence des COV dans les bâtiments et précise que le formaldéhyde est classé cancérigène.
L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset) a proposé en 2007 deux valeurs guides de qualité d’air intérieur (VGAI) concernant le formaldéhyde :

  • l’une, de 50 ?g/m3 en moyenne sur deux heures pour une exposition de courte durée,
  • l’autre de 10 ?g/m3 pour une exposition chronique.

En se fondant sur ces critères, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) a élaboré depuis 2009 des valeurs de référence pour fixer des niveaux à ne pas dépasser dans les bâtiments neufs ou rénovés. En 2009, la valeur maximale admissible pour une exposition longue durée au formaldéhyde est de 50 ?g/m3, et la valeur cible à atteindre en 2019 est de 10 ?g/m3. Ces valeurs, depuis abaissées à 30 ?g/m3 et à 10 ?g/m3, font l’objet d’un décret à paraître au plus tard début 2012. Or lorsque la ventilation n’assure pas son rôle de renouvellement de l’air ni d’économies d’énergie, ce n’est pas à cause des équipements… Mais de l’entretien, les installations marchent mal en raison d’un encrassement rapide des filtres au soufflage. Pour pallier à ce problème, le filtre d’air neuf doit être changé tous les quatre mois.

La ventilation : un véritable métier ?

Aujourd’hui, seul 1 % du parc de ventilations est entretenu et maintenu. Une nécessité en particulier dans les logements, car dans le tertiaire, les installateurs sont compétents et il y a de l’ingénierie. Plusieurs études menées par des organismes techniques, tels que l’Agence qualité construction (AQC), ou des compagnies d’assurance ont montré que nombre des dysfonctionnements étaient aussi lié au dimensionnement. Il existe un problème de filière du fait de la multiplication des corps d’état intervenant sur la ventilation.La remise à plat par Qualibat de ses qualifications ventilation va dans le bon sens. Elles devraient être proposées aux entreprises avant fin 2012. Pour que la ventilation ne soit plus simplement une spécialité, mais une véritable activité. Et que face à la performance énergétique, la qualité de l’air intérieur ne soit plus la grande perdante.

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